Le PVC a-t-il sa place dans un secteur de la construction circulaire?
Nous avons consulté l'ECVM, l'Association des producteurs européens de PVC, qui aspire à rendre ce secteur plus durable. Cette association a dès lors été à la base de VinylPlus, un engagement volontaire de l'industrie européenne du PVC qui, depuis déjà plus de 20 ans, pousse le secteur à s’engager dans une voie plus durable.
Magdalena Garczynska, Technical Project Manager, et Vincent Stone, Technical & Environmental Senior Manager, nous expliquent le chemin qu’a déjà parcouru le secteur.
Comment vous engagez-vous en faveur d’un avenir durable?
Vincent: Lors de la création de VinylPlus en 2010 a été élaboré un plan décennal avec des objectifs clairs visant à minimiser l'impact environnemental pendant la phase de production du PVC, à utiliser les additifs de manière responsable et à mettre en place des programmes de collecte et de recyclage. En 2020, un nouveau plan décennal a été élaboré pour aller encore plus loin, et en mai 2021, le secteur a réaffirmé son engagement avec le lancement de VinylPlus 2030, un nouvel engagement décennal vers un avenir durable et circulaire. Au cours des 8 prochaines années, nous continuerons à œuvrer en faveur d'une industrie du PVC circulaire, à réduire encore davantage l'impact environnemental de notre industrie et à nous concentrer sur la collaboration avec les autorités, les organisations et les partenaires. Nous constatons en effet que la collaboration tout au long de la chaîne est essentielle à la réussite des projets en matière de durabilité.
Le PVC peut-il contribuer à un secteur de la construction circulaire?
Magdalena: Absolument, le PVC permet de joliment contribuer au cycle technique dans le cadre de l'économie circulaire. Il est parfaitement possible de boucler la boucle en collectant puis en recyclant correctement le PVC. Cela fait déjà plus de 20 ans que les fabricants investissent dans cette optique. Aujourd'hui, les technologies pour recycler le PVC existent, différentes usines de recyclage ont été construites en Europe et des programmes de collecte sont déjà en place, bien qu’il faille continuer à les développer davantage afin de pouvoir recycler tout le PVC ayant atteint la fin de son cycle d’utilisation. Nous devons éviter que le PVC ne finisse en décharge ou dans un incinérateur. Il existe toutefois encore et toujours dans certaines contrées des législations qui compliquent le recyclage. Les autorités doivent également prendre leurs responsabilités.
Vincent: De plus en plus de portes et fenêtres en PVC sont prêtes à être recyclées. Ce qui est logique quand on sait qu'elles ont gagné en popularité surtout dans les années ‘80 et que leur durée de vie moyenne est de 35 ans. S'il ne s’agissait encore que de quelques centaines de tonnes au début de ce siècle, pas moins de 350.000 tonnes de profilés en PVC ont été recyclés en 2020. Les fabricants de profilés sont également devenus des fabricants de composés et des entreprises de recyclage. Avec son usine de recyclage de Dixmude et sa capacité de recyclage de 45.000 tonnes par an, Deceuninck en constitue un bel exemple. De plus, un excellent partenariat a désormais été mis en place avec les menuisiers et les installateurs qui, lorsqu'ils installent une nouvelle fenêtre, veillent à ce que l'ancienne fenêtre en PVC retourne chez Deceuninck pour être recyclée. On trouve aussi des usines qui recyclent le PVC dans de nombreux autres pays d’Europe, et pratiquement tous les fabricants de profilés recyclent également les chutes de leurs clients. Grâce à des investissements proactifs de par le passé, ils sont désormais prêts pour l'économie circulaire, pour autant que les matériaux pouvant être recyclés leur parviennent en quantité suffisante. C'est encore souvent là que le bât blesse.
Dans quelle mesure le PVC peut-il être recyclé?
Vincent: Il se recycle très bien. Le PVC recyclé atteint les mêmes performances que le PVC vierge. Il peut être recyclé jusqu'à dix fois sans perte de qualité, ce qui permet de prolonger sa durée de vie de 35 à 350 ans avant que le matériau ne perde de sa valeur. Ce n'est pas le cas pour tous les plastiques. C’est assez unique au PVC parce que c’est un polymère très stable et ses additifs restent intacts pendant le processus de recyclage. Le PVC recyclé est utilisé depuis déjà un petit temps dans le noyau des nouveaux profilés. Et Deceuninck ainsi que Kömmerling ont récemment lancé les premiers profilés produits à 100% à partir de PVC recyclé. Le marché s'y prépare progressivement, notamment via le Green Deal européen et l'accent mis sur la construction circulaire. Si le PVC recyclé est depuis déjà longtemps accepté aux Pays-Bas et en Europe de l'Est, d'autres pays ne voulaient même pas entendre parler de profilés avec un noyau en PVC recyclé en raison de la différence de couleur. Ce dernier est en effet toujours plus foncé que le PVC vierge, mais cela ne doit pas constituer un obstacle car les nombreux coatings et films disponibles permettent d'obtenir des fenêtres dans toutes les couleurs et finitions possibles.
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Dans quelle mesure le PVC recyclé est-il écologique?
Magdalena: Lorsque vous choisissez de remplacer une fenêtre par une fenêtre en PVC recyclé au lieu de PVC vierge, cela permet d’économiser 2 kg de CO2 par kg de matériau. Outre les économies de CO2, cela entraîne aussi des économies d'énergie considérables, le recyclage mécanique nécessitant très peu d'énergie par rapport au processus de production du PVC vierge. Alors que 19 MJ d'énergie sont nécessaires pour produire une tonne de PVC solide vierge, la production d'une tonne de PVC recyclé ne nécessite que 2 MJ d'énergie.
Vincent: Ces économies d'énergie peuvent atteindre 90% pour le PVC solide. La production de la résine de PVC surtout, et en particulier la production de chlore, nécessite beaucoup d'énergie et a le plus gros impact environnemental. Lorsque nous pouvons éviter cette phase, nous enregistrons des gains énormes.
Il y a quelques années, vous avez lancé le label Produit VinylPlus® afin de stimuler les efforts en matière de durabilité. Comment cela se passe-t-il?
Magdalena: Le label Produit VinylPlus® est attribué à des produits en PVC durables fabriqués et utilisés en Europe. Il encourage les fabricants à prendre des mesures, par exemple en matière d'efficience énergétique et de l'utilisation de produits recyclés. Ce label est octroyé après un audit réalisé par un organisme d'accréditation indépendant. Le processus montre aux entreprises les efforts concrets qu'elles peuvent effectuer pour améliorer leur score. Cela les oblige aussi à mettre en place un système de gestion qui précise comment surveiller et réduire leurs émissions de gaz à effet de serre ainsi que leur consommation d'énergie. Actuellement, ce label a déjà été attribué à 130 produits en PVC fabriqués dans 11 pays européens.
Vincent: Cela prend évidemment du temps pour qu'un tel label soit suffisamment connu, mais il est déjà reconnu pour certains appels d'offres publics (par exemple dans le cahier des charges type - Bâtiments de la Wallonie ou CCTB 2022) en tant que garantie efficace selon laquelle les produits répondent aux exigences de durabilité nécessaires. Il garantit que les produits présentent la teneur en recyclés appropriée, que les matières premières utilisées sont traçables et qu'elles ont été collectées et traitées de manière responsable. Il est également reconnu par le label de durabilité BREEAM et le label de qualité belge ‘Menuiserie Durable’ de la BCCA.
A vos yeux, quel est actuellement le plus gros défi en matière de durabilité?
Magdalena: Mettre en place les systèmes nécessaires pour améliorer la collecte du PVC pour permettre son recyclage. Les fabricants ont procédé à de nombreux investissements de leur propre initiative, mais les autorités et les autres maillons de la chaîne doivent également prendre leurs responsabilités. Il faut continuer à développer les technologies de triage et nous voulons trouver comment retirer certains additifs – qui ne sont plus utilisés aujourd’hui – des profilés en PVC avant de pouvoir recycler ces deniers.
Vous avez soulevé un point sensible. Beaucoup de choses ont déjà été dites et écrites sur ces additifs. Quelle est l'ampleur exacte du problème?
Vincent: Il s'agit principalement des additifs contenant du plomb qui étaient utilisés il y a 20 ou 30 ans pour rendre le PVC plus stable. Il y avait une bonne raison à cela, car le plomb possédait en effet les propriétés mécaniques appropriées et était dès lors utilisé dans toutes sortes de produits (de construction), comme par exemple les peintures, les vernis, etc. Entre-temps, de nombreuses études ont cependant montré que ces additifs étaient nocifs. L'industrie européenne a dès lors décidé il y a 20 ans de ne plus utiliser d’additifs contenant du plomb, même si cela n’a à ce jour pas encore été interdit par la loi.
Magdalena: Les vieux profilés renfermant des additifs à base de plomb peuvent toutefois être recyclés en toute sécurité. L'Agence européenne des produits chimiques a établi que le recyclage constituait la meilleure option. Le recyclage peut s’effectuer de manière contrôlée et sûre, alors que la mise en décharge ou l'incinération ne permettent pas de contrôler le processus et entraînent un risque d'exposition beaucoup plus élevé. C'est un problème du passé que nous devons gérer au présent de la manière la plus responsable possible.
Vincent: Lorsque vous l'utilisez dans le noyau des profilés, il n'y a aucun risque pour l'environnement ni pour la santé. Il a notamment été établi que le plomb ne peut pas migrer. De plus, il y a toujours une couche de PVC vierge autour du noyau, qui agit comme une barrière supplémentaire. À température ambiante, le PVC solide se comporte comme le verre. En d’autres termes, il possède une matrice très rigide à l'intérieur de laquelle la migration des substances n'est pas possible.
Et qu’en est-il de la génération d'additifs actuelle? Peut-on être sûr qu'ils ne sont pas dangereux?
Vincent: L'utilisation durable des additifs doit être évaluée en permanence. C’est là un pilier très important de notre programme. Nous avons dès lors élaboré, en collaboration avec le cabinet de consultance The Natural Step, la méthode ‘Additive Sustainability Footprint’, un outil que peuvent utiliser les fabricants et les transformateurs afin de mieux évaluer la durabilité des différents additifs possibles, afin qu'ils puissent faire les bons choix. Nous travaillons ainsi de la manière la plus proactive possible et, bien évidemment, nous continuons à tenir compte des dernières avancées scientifiques.
Le secteur peut-il s'attendre à voir arriver prochainement des portes et fenêtres en PVC bio-attribué?
Magdalena: Nous sommes très impatients de voir les premières applications dans ce secteur. Du PVC bio-attribué est aujourd’hui déjà disponible. La matière première provient d'une biomasse certifiée de deuxième génération, ce qui signifie que la biomasse n'entre pas en concurrence avec la chaîne alimentaire. Grâce à l'introduction d'éthylène renouvelable, il faut beaucoup moins de matières premières fossiles que pour la production de PVC classique. Cela permet de réduire les émissions de CO2 de plus de 90%. Des tuyaux sont déjà fabriqués à partir de ce matériau. Ce matériau a par exemple été utilisé dans une école maternelle neutre en CO2 récemment construite à Göteborg. Le PVC bio-attribué les a convaincus parce que c'est un matériau recyclable doté d’une longue durée de vie, mais aussi parce qu'il est léger et produit localement. Par conséquent, les émissions de CO2 dues au transport sont très faibles.
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