Le score d’EURECA sera-t-il meilleur que celui d’ETICS et/ou d’un système de façade ventilé ?
Circulaire & Répétitif
Le point de départ du projet EURECA ? Le parc immobilier belge a vieilli du point de vue énergétique et doit être rénové, à court ou moyen terme. Pour permettre une rénovation accélérée, il est essentiel de se mettre à la recherche de solutions pouvant s’appliquer à un grand nombre de bâtiments.
L’objectif de cette réflexion était aussi de développer un système circulaire de rénovation des façades, afin de rénover les immeubles rapidement et conformément aux principes de la circularité. Ce système de façade devait être démontable et réutilisable de sorte qu’il soit possible, en cas d’adaptation ou de démolition de l’immeuble, de le réutiliser sur un autre bâtiment. Une telle solution offre un maximum de potentiel pour les grands immeubles aux façades répétitives, résidentiels ou de bureaux par exemple.
Le projet EURECA a démarré en décembre 2019 et devait s’achever pour la fin de 2021. Mais la crise Covid a éclaté entre-temps. Les partenaires du projet - Bureau Bouwtechniek, UGent, Algemene Bouw Maes et De Witte Aluminiumconstructies – ont ainsi disposé de davantage de temps. L’enquête s’est achevée au printemps 2022.
Maquette en deux couches
Jona Van Steenkiste: “En concertation avec plusieurs experts de la façade, nous avons en tout premier lieu déterminé quels types de construction entraient en ligne de compte pour l’étude comparative. Nous avons ensuite élaboré plusieurs systèmes de rénovation de façade et les avons analysés à partir de différents critères : facilité de mise en place, durée du chantier, possibilités de réemploi, coefficient d’isolation, propriétés d’isolation acoustique… Nous avons en fin de compte opté pour une combinaison de deux systèmes, que nous avons développée et testée grâce à une maquette grandeur nature."
Lisa Van Gulck: “Cette maquette se compose de deux couches. Tout d’abord un lattis, pratique pour éliminer les irrégularités de la façade existante et permettre la pose éventuelle de canalisations ou câbles techniques. Ses profilés sont métalliques. Le bois a certes un impact réduit sur l’environnement, mais nous voulions un système unique et à l’épreuve des incendies pour les constructions de basse, moyenne ou grande hauteur. Cette couche a été garnie de laine minérale souple.”
“Le lattis sert également de système porteur pour l’accrochage de la deuxième couche, le système de façade proprement dit. Nous avons développé des panneaux de façade préfab de différents formats, en combinant des largeurs de 50,100 et 200 cm avec des hauteurs de 150, 250 et 350 cm. Avec ces panneaux, nous disposions donc d’une hauteur d’étage, mais nous pouvions aussi les combiner en hauteur avec deux fenêtres. Il a ainsi été possible de recouvrir immédiatement et par une seule couche isolante les éléments de bois ou de métal, ce qui évite la formation de pont thermiques.”
Jona Van Steenkiste: “Nous avons calculé et testé sur ordinateur le degré possible de couverture sur certaines façades avec les panneaux disponibles. Nous avons obtenu des valeurs très élevées, surtout sur les façades en pignon. Quant aux façades irrégulières ou avec des terrasses en saillie, il a été plus difficile de les ‘emballer’ avec des panneaux aux dimensions standard.”
Après tous les préparatifs théoriques, une maquette grandeur nature a été montée sur la façade de l’immeuble S4 du campus De Sterre de l’UGent. Quelques semaines plus tard, le modèle, une nouvelle fenêtre dans la façade de doublage entourée de quatre panneaux, avec les raccords nécessaires, a été démontée puis replacée sur une façade pignon de l’immeuble cette fois. Ceci offrait à l’équipe de recherche une vision concrète des aspects pratiques tels que la vitesse d’exécution ou les risques d’endommagement lors du démontage. L’objectif poursuivi était de maintenir les coûts environnementaux et de revient aussi faibles que possible. Les bénéfices espérés n’ont pas été atteints avec le système actuel.
Comparaison avec ETICS
Le système de façade nouvellement développé a été comparé à deux solutions courantes du marché. Le premier était ETICS, un système composé d’un panneau isolant rigide collé sur une structure portante, et revêtu d’une finition extérieure à base d’enduit. Grâce à sa simplicité de montage, ce système à faible impact environnemental est populaire et de prix abordable. Ses systèmes d’assemblage réversibles et la finition ne sont en revanche pas réutilisables. Qui plus est, l’enduit salit l’isolation, ce qui empêche son recyclage. Ainsi, un volume considérable de déchets semble inévitable.
Lisa Van Gulck: “Une étude LCA sur 60 ans a clairement montré que notre système ne peut rien face à ETICS. Mais on parle de la situation dans laquelle cette façade ETICS resterait en place 60 ans autour du même immeuble, car elle n’est ni démontable, ni réutilisable, ni circulaire. Notre système a justement été conçu et développé en tant qu’amélioration provisoire de la façade jusqu’au moment où une autre rénovation poussée s’imposera. Il doit donc pouvoir déménager régulièrement de bâtiment en bâtiment.”
“Par honnêteté, je dois encore vous dire que lors d’une étude LCA pour laquelle nous avons pris en compte un déplacement tous les 10 ans, sur une période de 30 ans, c’est ETICS qui s’annonçait encore comme la meilleure option. Notre système pouvait être réutilisé, moyennant quelques pertes de matériaux inévitables, tandis que le système ETICS devait à chaque fois être jeté et produit à nouveau. Mais l’impact environnemental d’ETICS est si faible qu’on peut le produire un certain nombre de fois. La différence relative s’est ensuite amenuisée à mesure que les déplacements se multipliaient. En revanche, pour les immeubles de grande hauteur, ETICS ne s’annonce pas comme le choix logique, en raison de sa moindre résistance au vent, et compte tenu de la classe de réaction au feu du matériel isolant, et de l’entretien que nécessite le système.”
Comparaison avec le système de façade ventilée
“Une comparaison a également été établie avec la façade ventilée. Celle-ci est composée de panneaux isolants, de profilés bois/métal et d’une finition. Ce système bénéficie lui aussi d’une construction relativement simple. Qui plus est, il peut faire l’objet d’une utilisation circulaire.”
“Un système de façade ventilée est robuste et circulaire aussi en grande partie. Il présente toutefois quelques manquements. Les profilés de bois ou de métal sur lesquels est réalisée la finition doivent pouvoir être fixés dans un mur suffisamment porteur. Beaucoup de bâtiments anciens sont constitués d’une structure de colonnes, garnie d’une maçonnerie moins robuste, qui ne permet pas le recours à ce système. Le nôtre convient bien en revanche sur ce type de construction élevée avec une lame de vide intérieur de piètre qualité. Autre différence par rapport à la façade ventilée, vous ne pouvez démonter ce type de façade que jusqu’au niveau du matériau, alors que le système EURECA peut l’être jusqu’au niveau de l’élément.”
Conclusions de l’étude
Jona Van Steenkiste: “Si nous comparons finalement les trois systèmes, il apparaît que, du point de vue de la circularité, c'est le système ETICS qui obtient les plus mauvais résultats. Dans la plupart des cas, le système de façade ventilé prend la première place, mais seulement lorsqu’il est démontable. Quant à notre système, il enregistre les meilleurs résultats là où le système ventilé ne peut être mis en place.”
“Dans le contexte de la construction circulaire, celui-ci est prometteur, mais il n’est pas fiable dans sa forme actuelle. Les raisons principales : il répond aux exigences les plus strictes, lesquelles ne sont pas toujours en vigueur, et les bâtiments sont aujourd’hui conçus sur mesure et donc trop spécifiques pour être isolés avec un nombre limité de panneaux de façade standardisés. Si l’on tient compte de la possibilité de réemploi, notre système est plus intensif en termes de matériaux.”
Faut-il alors jeter EURECA à la poubelle ? “Non, car l’étude nous a permis énormément de découvertes intéressantes. Des visions qui ont élargi et enrichi la pensée ‘circulaire’ chez les différentes parties concernées. Et, qui sait, peut-être une étude supplémentaire permettra-t-elle de raffiner la maquette. Nous l’espérons en tout cas.”
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