L’intégration circulaire des menuiseries extérieures dans les façades lourdes vs. légères
Commençons par le début: la Note d’Information Technique (NIT) 188 décrit comment installer une fenêtre dans un mur creux. Bien que cette NIT date de 1993, la méthode d'installation décrite dans celle-ci est encore largement appliquée de nos jours, et reste pertinente pour les façades soumises à de faibles contraintes. La complexité de nos façades a cependant fortement augmenté depuis 1993. Avec le temps, celles-ci se sont progressivement vu imposer des exigences de performance de plus en plus élevées, qui ont également un impact sur les menuiseries que nous installons.
En bref:
- Les bâtiments d'aujourd'hui sont beaucoup mieux isolés. En raison de l'épaisseur d'isolation plus élevée, la distance entre la menuiserie et le mur porteur augmente parfois.
- Avec le poids croissant des menuiseries – il suffit de penser aux doubles, voire aux triples vitrages –, cela signifie que l'ancrage devra absorber beaucoup plus de forces.
- Les isolations épaisses et les systèmes ETICS populaires de nos jours peuvent entraîner des problèmes acoustiques. Si la façade présente une masse insuffisante ou n'est pas fermée (on pense ici par exemple aux systèmes ETICS, aux façades ventilées et aux joints ouverts) et que la menuiserie est placée davantage vers le plan de la façade, cela pourra en effet entraîner une fuite acoustique entre la paroi intérieure du mur creux et la menuiserie.
- Les nouvelles réglementations en matière de sécurité incendie des façades prennent davantage en compte le risque de propagation du feu à travers le système de façade. Non seulement le revêtement de façade proprement dit doit répondre aux exigences, mais aussi les couches sous-jacentes. Dans certains cas, un raccord de fenêtre différent pourra s’avérer nécessaire.
- Si la construction étanche à l'air n'était pas encore très courante dans les années ‘90, nous savons aujourd'hui qu'en plus d'une isolation suffisante, une étanchéité à l'air performante s’avère également nécessaire pour réduire la consommation d'énergie pour le chauffage et l’éventuelle climatisation, ainsi que pour créer un climat intérieur agréable. Cela contribue aussi de manière importante aux performances en matière d’étanchéité à l’eau.
- Enfin, dans certains cas, l'étanchéité à la pluie ajoutera une complexité supplémentaire à l’intégration des menuiseries, surtout dans les bâtiments de grande hauteur soumis à des charges de vent plus élevées.
- Outre des exigences plus strictes, d'autres facteurs jouent également un rôle dans le choix de la méthode d'intégration des menuiseries. Comme le prix de revient, l’ordre de construction choisi, les tolérances à compenser et la rapidité de montage souhaitée. Avec les années, l’intégration correcte des menuiseries est donc devenue de plus en plus complexe. L'évolution vers un secteur de la construction circulaire viendra-t-elle encore compliquer les choses, ou viendra précisément simplifier la donne?
Façades lourdes vs. façades légères
Quand on parle de construction circulaire, on arrive rapidement au modèle de Stewart Brand, qui a montré qu'un bâtiment est constitué de différentes couches, ayant chacune une fonction et une durée de vie différentes.
Brand a identifié six couches:
- le site sur lequel se trouve le bâtiment
- la structure
- l'enveloppe du bâtiment
- les techniques
- la disposition spatiale
- les meubles et objets individuels
Il est crucial de s'assurer que ces couches soient dissociables. Si des adaptations doivent être apportés à une couche particulière, cela pourra se faire sans affecter la valeur des couches n'ayant pas encore atteint la fin de leur durée de vie.
Selon ce modèle, une façade durera en moyenne 20 ans, mais la durée de vie d’utilisation de la façade ne sera pas homogène. Celle-ci pourra varier de 20 à plus de 100 ans.
Grosso modo, il est préférable de faire une distinction entre:
- Les façades légères ayant une durée de vie d’utilisation de 20 à 40 ans, comme par exemple les systèmes ETICS et les façades ventilées. Il pourra s'agir d'une façade temporaire, adaptable ou réutilisable.
- Les façades lourdes dont la durée de vie d’utilisation pourra atteindre plus de 100 ans, par exemple avec un parement ou en béton.
Quand un bâtiment est-il durable?
Tout le monde est d'accord: il faut réduire l'impact environnemental des bâtiments. En d'autres termes, nous devons aspirer à utiliser le moins d'énergie et le moins de matériaux possible pour atteindre les exigences de performance spécifiées. Si l'on part du principe qu'une façade ne durera que 20 à 30 ans, utiliser des matériaux non-démontables à fort impact environnemental (comme la brique maçonnée de manière traditionnelle ou collée) sera évidemment exclu. Toutefois, si vous construisez une structure qui pourra résister à l'épreuve du temps, avec un revêtement de façade durable qui durera également des décennies, l'utilisation de matériaux ayant un impact environnemental initial plus élevé sera bel et bien justifiable. Celui-ci pourra en effet être ventilé sur toute la durée de vie du bâtiment, ce qui signifie en d’autres termes que l'impact environnemental sera tout de même limité pendant la phase d'utilisation.
Dans ce raisonnement, tout dépendra d'une conception intelligente:
- Façades légères: optez pour des matériaux ayant un impact environnemental limité et veillez à ce que la façade soit dissociable de la structure, de telle sorte que certains éléments pourront être réutilisés afin de minimiser encore davantage l'impact.
- Façades lourdes: réalisez un bâtiment solide mais flexible qui pourra remplir différentes fonctions au fil des ans, comme un immeuble de bureaux qui pourra aussi un jour se muer en un magasin ou un logement, par exemple. C’est ce que l’architecte bOb Van Reeth qualifie de ‘ruines intelligentes’: des bâtiments qui se prêteront à des affectations que nous ne pouvons peut-être même pas encore imaginer aujourd'hui.
Intégration circulaire des menuiseries dans les façades légères et lourdes
Les façades légères ne nécessitent généralement pas une méthode adaptée. Dans ce cas, la façade et les menuiseries auront une durée de vie comparable d'une trentaine d'années. Tant le revêtement de façade que les menuiseries seront dissociables l’un de l’autre et pourront être réintroduits dans le cycle de manière appropriée, par exemple par la réparation, la réutilisation, le recyclage ou la récupération énergétique.
Cependant, les mousses, colles et mastics peuvent compliquer la circularité. Ils souillent en effet les menuiseries, ce qui rendra leur réutilisation, surtout, plus difficile. Il sera donc conseillé d'utiliser ces matériaux avec modération, par rapport à ce qui sera techniquement nécessaire pour assurer l'étanchéité à l'eau et à l'air. La laine de roche ou les bandes de joint pourront former une alternative durable à la mousse PU, pour autant que les conditions permettent une utilisation correcte.
Dans le cas des façades lourdes, il sera par contre plus important d'intégrer la menuiserie de manière appropriée. Les fenêtres devront en effet être remplacées avant que la façade n'atteigne sa fin de vie. Vous voudrez donc pouvoir les retirer de la structure sans toucher aux éléments qui les entourent. Cela constituera un défi surtout pour les bâtiments soumis à des niveaux de pluie battante élevés, comme les bâtiments situés à la côte ou en plein champ, ou les bâtiments de grande hauteur. Dans la pratique actuelle, les menuiseries seront alors, dans la plupart des cas, collées à la face extérieure de la structure de la façade avec de l'EPDM. Une très bonne exécution d'un point de vue technique, mais si vous voulez pouvoir remplacer les menuiseries et conserver la façade, ce détail devra être réalisé autrement. En effet, l’incision de cette membrane sera inévitable lors du démontage, ce qui anéantira le concept d'étanchéité à l’eau initial.
L’élément interposé
Il existe toutefois une méthode qui apporte une solution et qui permet aussi de relever de nombreux autres défis en termes d'exigences de performance. Cette solution, de plus en plus populaire, est basée sur le précadre que nos voisins du Nord utilisent depuis déjà des années pour monter leurs fenêtres. Il s'agit d'un élément isolant fixe qui se fixe mécaniquement entre la menuiserie et le gros œuvre, de telle sorte que la fenêtre pourra être facilement dévissée lors d’un éventuel démontage. Même si les Néerlandais posent rarement les menuiseries en battée, ce sera aussi parfaitement possible avec un élément intermédiaire. Nous pourrons ainsi conserver l'esthétique que nous préférons, à savoir des dormants fins voire à peine visibles.
Les autres avantages sont les suivants:
- Les fuites acoustiques sont exclues du fait de la présence d'une masse fixe suffisante entre la menuiserie et le mur porteur.
- Le cadre ou dormant pourra être constitué de différents matériaux, en fonction des performances à atteindre, en matière de résistance au feu par exemple.
- Si l’élément interposé a été intégré à la paroi intérieure du mur creux de manière étanche à la pluie, l’étanchéité avec la menuiserie pourra être réalisée avec une bande de joint, qui pourra être remplacée en même temps que la fenêtre.
- Cela permettra de lever les inquiétudes relatives au poids de la menuiserie et au plus grand écart par rapport du mur porteur: les ancrages typiques seront en effet supprimés, à condition que l’élément interposé soit correctement dimensionné et ancré. L’élément interposé ou le cadre absorbera les forces.
- L'isolation de façade pourra être posée à fleur du cadre ou dormant.
La solution par excellence pour chaque façade?
Cet élément interposé entraînera évidemment un coût supplémentaire et son utilisation devra donc toujours être mise en balance avec les performances préconisées. Pour les bâtiments qui ne sont pas soumis à de lourdes charges, les avantages ne vaudront peut-être pas la peine par rapport aux coûts, et la pose traditionnelle en battée restera encore et toujours une exécution très précieuse.
Cependant, vu que de nombreux défis de construction pourront être solutionnés avec cet élément interposé, celui-ci constituera un choix judicieux dans de nombreuses configurations. D'autant plus qu'un tel système pourra être monté rapidement. Il pourra être constitué de divers matériaux durs, idéalement d’un matériau présentant une durée de vie comparable à celle du gros œuvre et de la façade. Il devra évidemment posséder des propriétés isolantes suffisantes en fonction du PEB, et pouvoir se travailler comme le bois, afin de pouvoir être réalisé sur mesure afin de compenser les tolérances du gros œuvre.
Cette méthode offre non seulement des perspectives pour les façades traditionnelles, mais pourra également être appliquée, par exemple, pour un système ETICS, une façade sandwich avec deux panneaux de béton et des façades légères ventilées. Plusieurs fabricants commercialisent déjà des solutions intéressantes. Ici aussi, évitez si possible de remplir le joint entre la menuiserie et l’élément interposé avec de la mousse, afin de ne pas souiller inutilement la menuiserie et, ce faisant, compliquer sa réutilisation ou son recyclage. Remplissez de préférence ce joint avec de la laine minérale souple ou utilisez une bande de joint intumescente. L’élément interposé n’est pas encore largement appliqué, mais a toutefois déjà fait l'objet d’études.
Ce principe sera par exemple testé dans un projet de De Bouwschil, qui prévoit la construction d’une façade circulaire, mais aussi son démontage et sa réaffectation. Les élèves du troisième degré en Techniques du Bâtiment de Don Bosco Sint-Denijs-Westrem se chargeront de la construction.
Lire cet article gratuitement ?
Il suffit de créer un compte gratuitement.
-
Lire quelques Plus articles gratuits chaque mois
-
Choisissez vous-même les articles que vous souhaitez lire
-
Restez informé via notre newsletter