Construire avec des déchets: de la terre à l'architecture?
L'empreinte de la construction est énorme
Aujourd'hui, ériger un bâtiment avec n'importe quel matériau de construction au monde ne pose plus aucun problème. L'un des principaux inconvénients de cette évolution réside cependant dans l'augmentation considérable des coûts environnementaux, due aux fortes émissions de carbone provenant de l'extraction, de la fabrication, du transport et de l'élimination de ces matériaux. Alors qu'il est précisément nécessaire de fortement réduire les émissions et d'utiliser les matériaux de construction de manière plus efficace.
Cela a conduit de plus en plus d'entreprises à rechercher et (re)découvrir des matières premières dans leur propre région pour essayer de les intégrer dans l'économie circulaire. Chez BC Materials, on s'est dit: pourquoi ne pas regarder sous nos pieds? La terre est l'un des matériaux les plus abondants sur notre planète et, en cas d'extraction locale, ne produit pas des quantités considérables de CO₂ stocké.
Des déchets comme matière première
BC Materials travaille avec de grandes quantités de terres provenant de travaux d'excavation à Bruxelles, Paris, Genève. Des terres jusqu'ici considérées comme des déchets. "Si 70% des terres bruxelloises peuvent être utilisées dans ce processus, les 30% restants ne le sont pas car ils sont mélangés à d'autres matériaux", explique l'entreprise.
L'énorme quantité de matériaux disponibles à Bruxelles montre que construire avec de la terre est non seulement faisable dans les pays moins industrialisés, mais aussi dans les régions disposant de grandes quantités de matières premières considérées comme des déchets.
Collaboration locale
Mais dans de nombreuses villes européennes, vous êtes rapidement confronté à un autre défi: les coûts de la main-d'œuvre. En Belgique, ceux-ci sont très élevés, ce qui peut rendre un mode de construction respectueux de l'environnement économiquement non-viable. Mais selon BC Materials, la terre peut parfaitement constituer un matériau de construction écologique et économiquement viable à condition de collaborer avec des acteurs locaux et d'adapter les techniques au contexte.
Dans le cadre de l'adaptation contextuelle, BC Materials, par exemple, travaille à Bruxelles avec une usine normalement dédiée à la production de masse de blocs de béton. L'entreprise consacre ainsi une fraction de son temps de production à la fabrication de la Brickette, une brique de terre comprimée (BTC) qui s'utilise pour les murs de maçonnerie. L'impact de cette collaboration est énorme, car elle lui permet de produire en une journée de production la même quantité de briques que celle que pourraient produire de petites machines en un an.
Associer la connaissance des techniques de production des matériaux de construction aux avantages de la production de masse a permis de réduire le prix des BTC de 200%, rendant ce produit économiquement compétitif par rapport aux blocs de béton et aux briques cuites traditionnelles largement utilisées en Belgique.
Construire en terre a donc toujours un effet bénéfique sur les émissions de carbone. Que les matières premières soient fabriquées selon des techniques manuelles, comme au Burundi, ou selon des procédés industriels avec une approche locale, comme en Belgique.
Pas de solution pour tout
Si les avantages sont si importants, pourquoi n'utilise-t-on pas la terre pour ériger des bâtiments entiers? En réalité, même si les matériaux à base de terre connaissent diverses applications et permettent de réduire jusqu'à cinq fois l'impact sur l'environnement, il n'y a pas vraiment de demande pour ce genre de matériaux de construction. C'est pourquoi BC Materials travaille sur plusieurs fronts: la formation des étudiants et entrepreneurs à l'utilisation des matériaux en terre, l'étude des normes et codes pour la construction en terre, la recherche de nouveaux produits et l'application de produits existants dans les projets de BC Architects... Tout cela devrait préparer le terrain pour créer une véritable demande capable de rivaliser avec les matériaux traditionnels.
Il est peu probable que la nécessité de continuer à construire pour répondre à la croissance de la population mondiale s'arrête. Mais notre façon de collaborer avec l'industrie et notre conception d'une bonne architecture pourraient changer le paradigme. Il faut d'abord considérer les avantages que peut apporter tel ou tel matériau au lieu de donner la priorité à l'esthétique. Sinon, nous aurons besoin d'une autre planète pour pouvoir fournir un toit à tout le monde, déclare-t-on chez BC Materials.