"Un citytrip à Vienne est en haut sur la liste de choses à faire avant de mourir"

Quelle est votre devise?

"Le week-end dernier, j'ai visité une exposition consacrée à David Hockney et j'ai été bouleversé par son œuvre. Je me suis souvenu de deux phrases qu'il a un jour citées lors d'une entrevue: ‘all good things need to be memorable’ et ‘love life’. À première vue, les deux sont diamétralement opposées. Mais il s’agit en fait de deux objectifs qui se complètent parfaitement et dans lesquels je peux totalement me retrouver. Mais aussi me perdre. Dans mon travail, je me lance toujours à corps perdu dans la recherche de la valeur ajoutée. Pour atteindre l’objectif le plus haut possible. Ce qui entraîne naturellement du stress. C'est pourquoi il est important de prendre du temps pour soi de temps en temps. Pour relâcher la pression. Pour se détendre. Pour profiter de la vie. Un champ de tension sur lequel il faut constamment trouver l’équilibre. Et il faut apprendre à l'accepter. Voire même à l’apprécier."

Votre petit plaisir coupable préféré?

"Une question difficile..., me suis-je dit. Mais un de mes collègues avait immédiatement la réponse toute prête: les chips striées au sel. Vraiment. C'est exact. Si je pouvais, j'en mangerais tous les jours, mais j'essaie tout de même de me retenir."

Votre héros de tous les temps?

"Dom Hans Van der Laan. Caroline Voet a déjà parlé de lui dans le confessionnal paru dans le numéro précédent. Alors que nous sommes plutôt un cabinet pragmatique qui essaie, dans tous ses concepts, de formuler la meilleure solution possible tant pour le client que pour la demande, le bâtiment et le lieu, Van der Laan accorde de l'importance à un niveau plus abstrait. Au rythme, aux mathématiques, aux liens. Cela rend l'architecture plus fondamentale, plus intemporelle... plus authentique."

"Nous ambitionnons aussi d'essayer de réaliser une telle architecture. Sans perdre le côté pragmatique. Pour y parvenir, j'accumule les expériences en lisant, en visitant, en absorbant, en réfléchissant afin de me forger ma propre opinion, une synthèse de toutes les impressions inspirantes. J'intègre tout cela dans des concepts concrets. Dans lesquels, je tente à mon tour d'établir des liens entre les grandes idées et les petits détails. C'est un travail difficile: tout tester, jeter ce qui ne fonctionne pas et trouver ce qui fonctionne bel et bien."

Votre endroit préféré dans le monde?

"Avec des amis, nous avons rénové une petite maison à Palmoli, en Italie. Un petit temple symétrique, en pleine campagne. Sur une colline, entouré d'oliviers. Sa rénovation et réhabilitation en maison de vacances ont été une sorte d'expérience primale. Dans cette région, on se méfie en effet encore des contrats. Une parole est une parole. Et vous ne pouvez vous fier qu’à celle-ci. Ce qui diffère totalement de notre petit pays où même les plus petits détails sont consignés dans une procédure au moyen de la paperasserie nécessaire.

Nous avons abordé ce projet lentement. Par vagues. Par sous-projets. Et nous avons vu l’ensemble grandir et se muer en quelque chose qui nous ressemble totalement. Une expérience vraiment unique. Nous nous y rendons plusieurs fois par an. Le reste de l'année, nous louons l’endroit comme maison de vacances."

Le sommet de votre carrière?

"La construction est un processus lent. Arriver sur un chantier et voir un nouvel élément réalisé constitue en fait toujours un temps fort. Mais si je devais tout de même choisir un moment, ce serait l'inauguration de ‘De Springplank’. Nous avons conçu une extension pour cette école primaire de Bruges en collaboration avec les architectes de Carton123. En 2015, ce projet nous a valu le ‘Prix d'Architecture de la Province de Flandre Occidentale’. La remise de ce prix s’accompagnait d’une exposition et d’une soirée de gala. Bref, le très beau couronnement d'un projet réussi. Et cela fait toujours plaisir."

Qu'y a-t-il sur votre ‘liste de choses à faire avant de mourir’?

"Un citytrip à Vienne. Je n'y suis jamais allé, mais j’en rêve depuis longtemps, en raison de l'architecture particulière et stratifiée. La ville compte d'innombrables ouvrages baroques, mais aussi du modernisme et même des styles régionaux. Le patrimoine mondial de l'UNESCO y côtoie une architecture contemporaine et innovante. On y trouve aussi partout des boutiques branchées, des clubs lounge tendances et des festivals animés. Ce qui donne, me semble-t-il, un cocktail de contrastes vivant et fascinant dans lequel j'aimerais me plonger."

Quel événement embarrassant préféreriez-vous ne pas raconter (mais vous allez quand même le faire ici)?

"Il y a deux ans, je suis allé à New York avec mon collègue Ward Verbakel et notre groupe d'étudiants. Les étudiants y avaient leur propre hébergement, mais j'avais loué un appartement pour nous deux. Mais lorsque nous avons voulu nous enregistrer... l'endroit n'existait tout simplement pas. Je me serais bien caché dans le sol. Le ‘cosmopolite’ s’était fait arnaquer. Conséquence: la semaine chargée l’est devenue encore plus. Entre les conférences et les visites, j’ai dû me plonger continuellement dans l’immobilier new-yorkais à la recherche d’autres hébergements. Nous marchions d’appartement en appartement, d’hôtel en hôtel. Et à la fin, nous étions complètement épuisés."

En quelle innovation (dans le domaine de la rénovation) placez-vous de hautes attentes?

"La construction durable commence toujours par la préservation de ce qui existe déjà. Par une utilisation sensée des bâtiments existants. A la demande du bureau de projets Herbestemming Kerken (actif dans la réhabilitation d’églises), nous avons réalisé il y a quelques années différentes études de faisabilité sur le redéploiement d’églises désaffectées dans les villages flamands. La question principale? Comment réhabiliter ces bâtiments de façon sensée, dans le respect de l'aspect historique, spirituel et social?"

"Les réponses étaient extrêmement variées, mais cela revenait souvent à déterminer ce qui manquait dans les communes. Quelles sont les fonctions qui n’ont pas encore de refuge, ou qui auraient besoin d'un meilleur encadrement. En faisant preuve de créativité, il est possible de rendre les églises aux communautés. De leur donner une nouvelle affectation mixte, collective et tournée vers l'avenir."

À quel endroit, quel immeuble, quel bâtiment, quel projet aimeriez-vous vous ‘attaquer’?

"A l’église Sainte-Walburge à Bruges, construite en 1619 par le frère jésuite brugeois Pieter Huyssens. L’édifice devait refléter les valeurs de l'ordre des Jésuites et est ainsi devenu la réalisation la plus riche et la plus purement baroque de Bruges. Avec une façade dynamique, de nombreux détails architecturaux à l'intérieur et à l'extérieur ainsi qu’un magnifique jardin avec orangerie tout autour. Nous avons déjà réalisé une étude de faisabilité pour sa réhabilitation. Et c'est précisément ce jardin que nous voulons utiliser comme qualité supplémentaire. En créant un lieu de recueillement, par exemple sous la forme d'un columbarium collectif."

Quel professionnel de la construction aimeriez-vous voir prendre place dans le confessionnal d’un prochain numéro?

“Sofie Beyen de Studio Roma. En collaboration avec elle, nous avons réalisé en 2016 l'étude de faisabilité pour la réhabilitation partielle ou totale des églises paroissiales. Je suis curieux d'entendre ses réponses à vos questions."